Villes martyres
VISE : DEUX FAMILLES DEPORTEES. Lors de la prise de la ville de Visé par les Uhlans le 4 août 1914, deux familles voient partir leurs hommes en déportation. Joseph L., 44 ans, inspecteur, et son frère, Pierre L., menuisier âgé de 35 ans, sont emmenés. Pierre meurt en déportation deux mois plus tard, tandis que Joseph revient à Visé juste avant Noël.
Dans la famille D., les coiffeurs Jean-Simon (55 ans) et Gaston (28 ans), ainsi que leur cousin Joseph (41 ans), directeur de société, vivent la même déportation vers Sennelager. Tous trois sont libérés à l'été 1915 après avoir fait du terrassement, transporté du gravier et coupé du bois.
LOUVAIN : PRIS POUR UN FRANC-TIREUR. Georges C. a 18 ans lorsqu'il est pris dans la destruction de la ville de Louvain. Originaire de Bruxelles, il guide une centaine de soldats belges en pleine déroute dans les environs de Kessel-Loo. Désigné par les soldats allemands comme franc-tireur, il est plusieurs fois mis en joue pour être abattu. Il est sauvé parce qu'il parle allemand !
Georges est emmené vers l'Allemage avec les autres déportés de Louvain. Il est dépouillé de ses biens : bottines, chaussettes, veston, gilet, chapeau, montre en argent, chaîne en or, portefeuille avec près de 100 frs. Il est soumis au travail forcé de déchargement des wagons, de construction de baraquements et de travail dans une tourbière. Il revient chez lui en mars 1915.
On la fait sortir de la maison pour la mettre sur la place de l’hospice pour les tuer (…). Ils lui ont [donné] des coups de fusil dans le dos puis on la faisait rentrer à l’hospice (…) puis elle a tâché de rentrer chez nous mais les Allemands l’ont encore remis à l’hospice (…). Elle avait les Allemands de chaque côté de la poitrine (…). Puis, nous avons eu la maison en feu.
HERVE 1914 : MENACEE ET BATTUE SOUS LES YEUX DE SA FILLE. Gertrude B. est née le 5 octobre 1875 à Herve et a une fille, Emerance. Gertrude est servante et travaille pour le bourgmestre de Herve.
Le 5 août 1914, les soldats allemands entrent à Herve, mettent le feu aux maisons et contraignent les habitants à sortir. Elle est emmenée à l’hospice de Herve. Ils menacent, à plusieurs reprises, de la fusiller. Sa fille de 11 ans assiste à ces scènes atroces.
PAYS DE HERVE, 1914 : MOURIR POUR SAUVER UN ENFANT. Le cultivateur François R. a 62 ans. Il est marié et habite dans le village de Mélen. Le 6 août 1914, François décide de sauver Pierre. Cet enfant vient d’être blessé lors des combats au village voisin de Labouxhe. Il veut le reconduire chez ses grands-parents, qu’il connaît. En cours de route, François est aperçu par deux soldats allemands qui le poursuivent jusqu’à sa maison. François essaye de s’enfuir, en vain. Les deux soldats le tuent à bout portant.
Le maçon Henri R., habitant lui aussi à Mélen, témoigne de l’acharnement des soldats : « j’ai aidé à l’ensevelissement du sieur R. François qui venait d’être tué par les Allemands. J’ai constaté qu’il avait été percé d’une baïonnette et que son bras avait été coupé ».
Battus par les défenseurs du Fort de Fléron, les soldats allemands se vengent sur les habitants de Mélen. Ils réveillent les habitants et en tuent au moins onze. Le 8 août 1914, ils sélectionnent septante-deux habitants des villages avoisinants et les exécutent dans un champ. Ils boutent ensuite le feu au village.